Claudia Brutus, plasticienne
L’expression apaisée d’un chaos identitaire
Née d’un père Haïtien en exil et d’une mère bulgare ayant choisi d’embrasser l’altérité, Claudia Brutus a grandi entre deux mondes, celui de son itinérance réelle et celui du récit de ses racines. Par-delà les frontières et par procuration, sa vie est perpétuellement tiraillée entre des identités multiples aussi palpables que fantomatiques, et lorsqu’elle arrive à Paris à 20 ans, elle intègre les Beaux-Arts avec une certitude : être artiste lui permettra d’affronter cet héritage désarmant. Fuyant résolument les perspectives que l’on trace pour elle, Claudia Brutus cultive au contraire le paradoxe afin d’apprivoiser les antagonismes qui l’animent. Elle élabore progressivement ses peintures comme de vastes complexes de chemins de traverses et de voies tortueuses, autant de périples imaginaires au cours desquels elle assemble les fragments de son histoire. Au premier abord, la peinture de Claudia Brutus est presque joyeuse… Elle se révèle pourtant d’une gaieté dramatique, séduisante et douloureuse, sombre et flamboyante, anonyme et profondément cathartique. Son univers est fait d’oxymores, de liaisons improbables, d’associations de contrastes, de vides qui remplissent. Les couleurs vives se détachent des fonds ternes, les figures sont précises mais évanescentes, les scènes évidentes tout en restant indéchiffrables, le réalisme le dispute au décoratif, les sujets les plus funestes débordent d’allégresse, et, finalement, ses tableaux sont aboutis dans l’inachèvement. En refusant la perception monoculaire du monde et la catégorisation des Hommes, Claudia Brutus nous propose une vision diaphane et irrésolue, une superposition de dimensions éparses rendues cohérentes par un tissage de veines, de traces, de motifs, de corps d’hommes et de femmes qui, comme elle, ne sont ni d’ici ni d’ailleurs tout en étant parfaitement à leur place. Plus actuelle que jamais, l’œuvre de Claudia Brutus nous renvoie à notre propre identité, car derrière l’apparente cohérence de notre histoire, nous avons nous aussi nos zones d’ombre, nos mystères irrésolus, nos doutes muselés, nos hontes enfouies, nos rêves résignés, et toutes ces plaies ouvertes que nous laissons saigner de peur d’avoir à les soigner. Claudia Brutus, en les affrontant pour mieux les comprendre, nous offre une vision pacifiée de nos propres fêlures. Alexandre Eudier |
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