Le projet de reconstruction de sites patrimoniaux comme le Centre d'art, soutenu par une fondation française et en partenariat avec la Fondation FOKAL est en cours.
Le centre culturel Anne-Marie-Morisset de la famille Trouillot, financé par la Fondation de France ne désemplit pas dans le quartier Delmas depuis sa création.
La fondation culture et création qui existe depuis 1992 basée à Port-au-Prince a soutenu près d'une soixantaine de projets culturels, répartis dans les zones touchées par le séisme. Souvent petits, ces projets ont renforcé le maillage culturel notamment en province.
La Smithonian Institution a renouvelé son appui au CSBC, Centre de sauvetage de biens culturels, qu'elle avait contribué à mettre en place et qui s'est déployé sur 18 mois, a fait intervenir une douzaine de restaurateurs américains, formé plus de 150 Haïtiens afin de sauver plus de 35 000 oeuvres, peintures, sculptures, papiers, livres, artefacts... Le projet a construit des espaces de réserve au MUPANHA (Musée du panthéon national haïtien), au Centre d'art, aux Archives nationales, sur le site de la cathédrale de la sainte Trinité, mais aussi a aidé des collections privées. Désormais c'est l'ISPAN qui est en charge de la gestion du centre et supervise la construction d'un nouveau bâtiment destiné à former les futurs restaurateurs haïtiens et à accueillir les oeuvres endommagées.
En littérature, les écrivains Jean Euphèle Milcé et Emmelie Prophète ont lancé La maison des écrivains , résidence Georges-Anglade, avec le soutien du Pen Club, dans le quartier montagneux de Thomassin, dans les montagnes, tandis que la peintre Pascale Monnin, et l'écrivain/poète James Noël ont investi Port-Salut et son bord de mer avec Passagers des Vents, une résidence artistique pluridiscplinaire.
Quant aux éditions Bas de Page, celles-ci nées également après le séisme, elles réunissent un groupe de jeunes auteurs décidés à apporter leurs compétences au secteur du livre mais surtout leur envie de faire de nouvelles figures littéraires.
Dans le secteur musical, Kay Mizik la est un autre exemple de structure qui a pu émerger après le séisme. Centre de ressources pour la musique, le lieu possède une médiathèque, un espace où les professionnels de la musique peuvent se réunir, débattre de son évolution et des problèmes rencontrés dans le secteur. Une première pour ce secteur en quête de structuration depuis des années.
Malgré le manque de lieux de création et de diffusion, certains projets, comme le festival quatre chemins ou le festival de Jazz de Port-au Prince du 19 au 26 janvier (7° édition) continue à grandir.
D'autres associations, compagnies de théâtre, de danse, des groupes musicaux sont également très actifs. Foudize Théâtre, est l'un d'eux, qui malgré une situation précaire, prépare la troisième édition de son festival de contes, tandis que le BITH (Brigade d'intervention théâtrale haïtienne), né de la rencontre entre jeunes comédiens haïtiens et Jacques Livchine, fondateur du Théâtre de l'unité, a permis une tournée dans les plus importants festivals de théâtre et d'arts de la rue de France durant l'été 2012.
Hors, mais pour et avec le pays
Basé en France mais dans une proximité continue avec Haïti, le Collectif 2004 Images, notamment à travers le Réseau Culture Haïti continue ses actions de mise en réseau d'artistes et structures culturelles. Cette association a notamment dernièrement contribué aux projections de films du Festival de l'Amitié à Jacmel ou intégré la compagnie de théâtre Foudize Théâtre dans un projet de l'Union Européenne, il accompagne la mise en œuvre de projets de reconstruction comme le Centre d'art, et démarre en France, en janvier 2013, une émission sur le cinéma haïtien Sinelakay en partenariat avec la radio Kon Lambi (RFPP-Radio fréquence Paris plurielle).
Enfin, après son engagement dans la réalisation du Guide de la Caraïbe Culturelle 2010, le Collectif 2004 Images poursuit sa participation active au sein du projet KAMACUKA, réseau professionnel du secteur culturel caribéo-amazonien.
Depuis Paris encore, l'association Haïti Actions Artistes travaille à la mise en place d'une coopérative d’achat et de vente de matériaux pour artistes avec des fonds collectés lors d'une vente aux enchère en 2010 d'oeuvres offertes par des artistes venus de tous les pays. Une boutique communautaire de fournitures pour artistes peintres et sculpteurs devrait ouvrir au Canapé Vert (Port-au-Prince) en mars 2013 en partenariat avec la Fondation Culture Création qui l'accueille dans ses locaux. Une production locale de peinture fine pour artistes sera lancée à l'occasion et vendue à la boutique.
Depuis la Guadeloupe ou la Martinique, goudou-goudou n'aura pas réussi à rompre le pont patiemment reconstruit entre ces îles. Etc-Caraïbes, le Prix insulaire des Amériques, Textes en parole, Kamodjaka, Gens de la Caraïbe, Fonds Saint-Jacques travaillaient déjà avec Haïti et continuent, bien évidemment.
Enfin, de nombreuses associations à l'étranger œuvrent à faire connaître la culture haïtienne et organisent de nombreuses activités : Haiti Cultural Exchange est basé à New York, le CIDIHCA au Canada, tandis qu'Échanges et Synergie et l'action de Dominique Desmangles, consiste à partager l'information culturelle sur Haïti, respectivement en Belgique et en Suisse.
Au niveau gouvernemental
On le voit, tout n'est pas sombre, toutefois les besoins restent considérables et l'une des priorités du ministère de la culture haïtien sera de mettre en place une véritable politique culturelle garantissant la pérennité des actions, au risque sinon de voir se répéter éternellement les « petits coups » qui à terme ne font qu'entretenir la précarité dans laquelle se trouve ce secteur déjà extrêmement fragile et pourtant si essentiel pour Haïti.
Le gouvernement a annoncé la restauration du Rex et du Triomphe, toujours en salle de spectacle, et tous deux situés place du Champs de Mars. Ces lieux apporteront sans aucun doute un nouveau souffle à la création. Toutefois, il convient de rester prudent, des annonces ont été précédemment faites qui n'ont pas abouti.
Le programme ARCADES de l'Union européenne qui a pour mission le renforcement des capacités du secteur culturel notamment gouvernemental, a contribué à soutenir diverses initiatives mais avec son arrêt programmé pour 2013 inquiète déjà ceux dont la création dépend de ce type d'accompagnement.
Financements extérieurs
De nombreuses actions ont été financées par la Fondation de France via le fonds « solidarité Haïti » et notamment le FIL Culture. Ainsi ces projets ont compris ausi bien des évènements ou actions ponctuelles jusqu'aux actions de construction ou restauration de bâtiments tels le Centre Culturel Anne-Marie Morisset ou de cinq CLACS (Centres de Lecture et d'Action Culturelle) situés dans des zones touchées par le séisme. De même FOKAL depuis sa création en 1995, s'est toujours engagé auprès du secteur culturel qu'elle soutien de manière constante et qui courant 2011 a inauguré le Mémorial du Parc de Martissant, en hommage aux victimes du séisme .
Un défi, des pistes de solution
Et il ne faut pas oublier les artistes, les premiers des créateurs indépendants, ce sont eux qui payent le prix cher de l'absence d'infrastructures et ce sera là sans doute le principal défi que devra affronter le secteur. Un secteur qui devra également compter de plus en plus sur ses ressources locales à mesure que les bailleurs se retireront. Aussi, la Fondation de France soutient-elle l'organisation du premier colloque sur le mécénat culturel annoncé en juin 2013 à Port-au-Prince, et qui vise à impliquer davantage et mieux les entreprises privées dans l'accompagnement du développement culturel du pays. Un défi, une utopie ? Peut-être, mais c'est aussi de ces rêves ou projections que se nourrira l'avenir de la société haïtienne.
Anne Lescot et Karole Gizolme
> Lire aussi La Guadeloupe et ses échanges culturels avec Haïti, sur le Réseau Culture Haïti
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